K comme Kèkchose.
Tous les personnages masculins du tableau sont figurés en plein effort. Ainsi les voit-on (comme le fait remarquer, en anglais, le titre) : « Essayant d'attraper, mais quoi ? »
A une question posée de la sorte, l’auteur du Cycle de Cheval à Vélo se plaît à penser qu’un Queneau ne répondrait que d’un mot : kèkchose.
Queneau Raymond: « ça a toujours kèkchose d’extrême un poème. »
A l’image du mot kèkchose, en rupture cocasse d’orthographe, tout poème se situerait à la fois dans la langue et hors langue, confinant de la sorte --sans même avoir trop l’air d’y toucher-- à l’extrême du langage.
A l’instar de ce kèkchose-là, le bizarre écheveau de couleurs z’emmêlées dont l’oblique barre la gauche du tableau (et sur lequel un quidam assorti d’un chapeau [mais non emmanché d’un long cou] tente en vain de mettre la main) se situerait à la fois dans la saynète représentée et hors de cette fiction.
Cet écheveau bigarré se veut en rupture d’image. Ni objet nommable, ni chose se profilant vraiment à l’horizon de l’esprit ; mais un kèkchose quelconque –non, kelkonk-- en décalage avec ce qui prévaut tout autour de lui. Un kèkchose bariolé. Délocalisé hors graphé (autrement dit, hors du monde des mots comme de celui du graphisme ou du dessin) en raison de la picturalité singulière qu’il doit à son mode de production : une impression sur le support faite par un fer à repasser. Un tel écheveau de couleurs ne vient en effet à la vue que lorsqu’un fer à repasser bien chaud écrase des pigments de pastel gras, puis les mêle sous sa semelle, les enfouissant ainsi, avant de les mettre au jour, au plus profond de sa nuit.
Dans le Cycle de Cheval à Vélo, tout ce qui, de même, est produit au fer à repasser, entend faire écho au kèkchose de Queneau, essaye d’en proposer un ex-aequo visuel. Car, pour l’auteur du Cycle, l’étrangeté radicale que ce terme incongru introduit, mine de rien, dans la langue, par l’épreuve qu’il impose à celle-ci sur ses frontières, ne serait pas sans rappeler celle que LOVE instille de manière subreptice dans VELO, à la lisière du français et de l’anglais : sur ces confins langagiers où s’échine à pédaler notre farceur de Facteur.